Brian Lee Crowley

À l’heure actuelle, deux provinces canadiennes illustrent combien le climat d’investissement peut se détériorer rapidement et combien il faut de temps pour s’en remettre

Le problème qui survient lorsque votre réputation se gâte, c’est qu’une fois que les gens ont découvert qu’ils ne peuvent pas se fier à votre parole, lorsqu’ils se sont rendu compte que vous seul comptez à vos propres yeux et que vous n’accordez jamais d’importance aux autres, ils cessent de s’intéresser à vous. Et puis, même si vous vous amendez, il faut beaucoup de temps pour que quelqu’un s’en aperçoive. À l’heure actuelle, deux provinces canadiennes illustrent combien le climat d’investissement peut se détériorer rapidement et combien il faut de temps pour s’en remettre.

En Nouvelle-Écosse, une prometteuse industrie d’exploitation de pétrole et de gaz en mer sombre lentement dans le coma. Les gouvernements et les fournisseurs de l’industrie soutiennent que la baisse soudaine de nouvelles activités d’exploration est simplement la conséquence de récents résultats décevants de forage, mais ce n’est là qu’une partie de la réalité.

Si certains puits de forage se sont révélés vides, d’autres lieux d’exploration s’avèrent très prometteurs à la suite d’essais sismiques. De plus, les prix du pétrole et du gaz atteignent maintenant presque des records. Alors, lorsque même une géologie prometteuse et des prix élevés ne suffisent pas à inviter les grandes compagnies d’exploration à la table, c’est qu’il y a quelque chose de plus à l’oeuvre que la déception causée par quelques trous vides.

Ce quelque chose de plus tient au fait que la Nouvelle-Écosse s’est acquise une mauvaise réputation et les compagnies ont fui vers des cieux plus accueillants où non seulement les chances de trouver du pétrole et du gaz sont meilleures, mais où les politiques gouvernementales soutiennent mieux les efforts de l’industrie.

Depuis les premiers jours de l’exploration en mer, l’industrie s’est plainte de ce qu’il faille jusqu’à deux fois plus longtemps pour obtenir les approbations nécessaires en Nouvelle-Écosse comparativement à d’autres autorités régissant l’exploration ailleurs, comme dans le golfe du Mexique et la mer du Nord. De tels délais et une incertitude de ce genre ajoutent énormément aux coûts d’exploration.

Il a fallu des années pour que notre gouvernement daigne même reconnaître l’existence du problème. Puis, il a fallu 27 réunions aux décideurs uniquement pour en arriver à un accord devant mener à une meilleure façon de faire. Et le gouvernement ne dispose encore que d’un accord d’intention de mieux faire.

Un jour, peut-être, un meilleur procédé en résultera. Mais cela ne fera que donner à la province ce qu’elle aurait dû obtenir en premier lieu. En outre, des accords ont été modifiés unilatéralement et qui ont eu pour effet d’augmenter rétroactivement le coût des projets de développement. Aujourd’hui, les gens que les Néo-Écossais aimeraient voir investir des milliards dans leur région ont en tête un héritage de frustration et de déception.

Colombie-Britannique

La réputation a son importance. Au début des années 1970, la Colombie-Britannique a adopté une politique de redevances punitives à l’encontre des sociétés minières et créé un climat de réglementation qui a fait fuir les investissements de ce qui avait été l’une des grandes régions mondiales de l’activité minière. Victoria semble avoir enfin mis de l’ordre dans la réglementation et allégé le fardeau fiscal, mais ce n’est que cette année que les investissements ont recommencé à alimenter l’industrie.

À titre de l’un des auteurs d’une récente étude sur les notes d’intention touchant les investissements dans l’industrie, je peux affirmer qu’une mauvaise réputation dure longtemps. La Colombie-Britannique a fait de véritables efforts pour se réformer, mais les compagnies doivent avoir confiance qu’un bon climat politique régnera lorsqu’elles entameront leur production et lorsque la mine sera en pleine activité pendant des années à venir. C’est pourquoi la Colombie-Britannique ne se classe qu’au 44e rang parmi les 64 grandes régions minières dans le monde où les patrons des sociétés minières souhaitent investir. La Colombie-Britannique a détruit la confiance de l’industrie et celle-ci est tout simplement allée ailleurs, investissant au Québec, au Chili et ailleurs des sommes qui autrement auraient créé des emplois et des occasions d’affaires aux gens de la Colombie-Britannique.

Il a fallu une génération à la Colombie-Britannique pour ne serait-ce que commencer à réparer les dégâts, mais la province semble maintenant engagée sur la voie de la reprise. De son côté, la Nouvelle-Écosse n’a même pas encore admis que sa réputation a été sérieusement entachée. Entre temps, la plus formidable occasion économique de la région en une génération s’envole graduellement.

Brian Lee Crowley  est le président de l’Atlantic Institute for Market Studies (www.aims.ca ) un groupe de recherche en affaires publiques d’Halifax.